Il y a 2 ans, Jade Lévesque mettait les mains dans les poubelles du Restaurant de l’ITHQ : coquilles d’œuf, peau de saumon, pelures de pommes de terre, elle a trié, pesé et catégorisé tous les déchets produits dans nos cuisines pendant une semaine. Pas la plus glam des missions pour cette doctorante en sciences des aliments, mais un passage obligé pour répondre aux questions phares de sa recherche : quels sont les impacts environnementaux et économiques du gaspillage alimentaire en restauration? Et quelles sont les meilleures stratégies pour les réduire?
Lundi le 24 janvier prochain, Jade et ses collègues du GastronomiQc Lab, l’unité mixte de recherche en gastronomie de l’Université Laval et de l’ITHQ, présenteront les conclusions de leurs recherches lors d’un webinaire portant sur l’éco-efficience en restauration.
Nous avons parlé avec elle ainsi qu’avec Jonathan Lapierre, directeur de la restauration à l’ITHQ, afin qu’ils nous donnent un avant-goût de ce que les restaurateurs et les membres de l’industrie pourront apprendre lors de ce rendez-vous.
Pleins feux sur l’éco-efficience
Commençons par la base : c’est quoi, l’éco-efficience? « L’éco-efficience vise à augmenter la valeur d’un produit ou d’un service tout en diminuant son impact environnemental », précise Jade Lévesque.
Selon Jonathan Lapierre, l’impact environnemental est une préoccupation de plus en plus présente dans l’industrie, non seulement chez les clients, mais aussi parmi les professionnels du milieu : « Les jeunes qui commencent dans le métier sont bien plus sensibilisés aux enjeux environnementaux que ma génération pouvait l’être. C’est donc inévitable que l’offre s’adapte à leur vision, à leurs valeurs et à leur façon de consommer. Et c’est tant mieux! »
De l’argent dans les poubelles
Les équipes et les clients sont donc prêts pour du changement. Mais en temps de pandémie et de pénurie de main d’œuvre, est-ce réaliste pour les restaurateurs de mettre l’éco-efficience dans leur liste de priorités? « Réduire le gaspillage alimentaire, ce n’est pas juste pour l’environnement : c’est aussi pour sauver de l’argent, commente Jade Lévesque. Avec l’augmentation actuelle du prix des denrées et les marges de profit souvent peu élevées dans l’industrie, ça vaut le coup de se pencher sur le sujet. »
« Il y a une logique économique à l’éco-efficience : quand on cuisine des aliments qu’on aurait jetés autrement, on économise. – Jade Lévesque, doctorante en sciences des aliments »
Pour suivre la parade, tout se joue dans le canevas du menu. « Il faut accepter de voir ça différemment et il faut aussi que le client voie la valeur ajoutée de ce changement, explique Jonathan Lapierre. Ce n’est plus nécessairement la truffe ou le caviar qui va être mis en valeur dans l’assiette, mais plutôt un navet, qu’on utilise en entier. » Il croit fermement que les restaurateurs et les clients gagnent à réfléchir en ce sens. « Ça va amener un profil de consommateurs différent qui va avoir du plaisir à comprendre le cheminement créatif », insiste-t-il.
En mode solution
Compliqué d’être éco-efficient quand on gère un restaurant? Pour les deux conférenciers, il existe plusieurs pistes de solution simples et abordables à explorer. « Par exemple, le pain et le beurre sur la table, ça fait partie des pertes importantes d’un restaurant, souligne Jonathan Lapierre. Le client s’attend toujours à en avoir sur la table. Mais en réalité, ça entraîne énormément de gaspillage parce qu’on en donne plus qu’il n’en faut. » Certains restaurateurs ont d’ailleurs commencé à mettre le pain au menu ou à en offrir seulement à la demande du client.
Peu importe les nouvelles pratiques adoptées, l’éducation et la mobilisation des équipes sont la clé. « Il faut développer une culture de collaboration entre l’employeur et l’employé, ajoute Jonathan Lapierre. Il faut vraiment que l’équipe soit impliquée dès le départ et que ça devienne ancré en eux. » À cela s’ajoute la créativité, un atout déjà particulièrement présent en restauration. Dans toutes les gammes de restaurants, la créativité sera très utile pour trouver des solutions de rechange réalistes, tant pour le restaurateur que pour le client. « Enfin, une planification en amont, ça aide beaucoup », conclut Jade Lévesque.
Envie de poursuivre la conversation avec nos chercheurs? Soyez des nôtres lors du prochain Rendez-vous virtuel du GastronomiQc Lab Éco-efficience : avenue de durabilité et d’innovation en restauration, lundi 24 janvier, de 10 h à 12 h.
Le sujet vous intéresse? Voici les prochains Rendez-vous à mettre à votre agenda :
- 31 janvier – S’approvisionner localement : défis actuels, récoltes de demain
- 7 février – Produits d’ici sous la loupe : révéler leur plein potentiel