Au cours des dernières décennies, la culture gastronomique québécoise a beaucoup évolué. Elle s’est particulièrement enrichie au contact des diverses communautés culturelles qui se sont établies dans la province : les Français, bien sûr, mais aussi les Italiens, les Grecs, de même que les membres de la communauté juive et vietnamienne, pour ne nommer que celles-là.
Aujourd’hui, ce sont les enfants de ces immigrants de première génération qui continuent à faire rayonner l’héritage gastronomique de leurs parents. Pour eux, le respect des traditions est important. Mais ils ont aussi leur propre manière de faire les choses. Diplômée du programme Hautes Études en gestion hôtelière internationale de l’ITHQ et vice-présidente des ventes et du marketing au sein du Groupe Longtin, My Hanh Pham en est un exemple vivant.
Bonjour My Hanh! Raconte-nous un peu l’histoire de ta famille…
Mes parents ont immigré au Canada : mon père, comme étudiant, et ma mère, afin de fuir la guerre. Comme de nombreux Vietnamiens, ils se sont installés sur la Rive-Sud de Montréal.
Mes parents sont devenus entrepreneurs parce que mon père s’ennuyait des saveurs de son pays natal, en particulier de la saucisse Gio Lua. Pour ceux qui ne connaissent pas, c’est une charcuterie traditionnelle faite à base de porc que l’on retrouve entre autres dans les sandwichs banh mi. C’est un peu l’équivalent vietnamien du jambon ou du bacon canadien!
Parce qu’il voulait que sa famille et ses amis puissent continuer à profiter de cette tradition, mon père a commencé à produire les saucisses Gio Lua ici, au Québec. Or, avec toute la communauté vietnamienne présente au Canada, ce produit est rapidement devenu un hit!
Après avoir ouvert une première usine de transformation sur la Rive-Sud, en 1988, mon père en a inauguré une deuxième au Texas puis une troisième au Vietnam. Aujourd’hui, sa petite entreprise de saucisses est devenue une multinationale!
La famille Pham dans les années 80 : « Mon père est le visionnaire et ma mère est la personne la plus travaillante que je connaisse! »
As-tu toujours su que tu allais travailler dans l’entreprise familiale?
J’ai quatre frères et sœurs et depuis qu’on est tout petits, on a toujours travaillé à l’usine. On a tout fait : hacher la viande, emballer le produit et même passer le balai!
De mon côté, l’entrepreneuriat m’a toujours passionnée : j’ai ça dans le sang! Après mes études, je me suis lancée en restauration indépendante avec des amis, mais je me suis rendu compte que la complicité familiale était importante pour moi. J’ai aussi compris à quel point il y avait des opportunités de développement au sein de notre entreprise.
Le rêve de mes parents était que nous travaillions ensemble, mais ils m’ont toujours donné le choix. Si un jour j’ai des enfants, je veux faire la même chose et les encourager à poursuivre leurs rêves, quels qu’ils soient.
Tu travailles aujourd’hui avec tes quatre frères et sœurs. Quels sont les avantages et les inconvénients de travailler avec les membres de sa famille? Penses-tu que c’est l’une des clés de votre succès?
Pour moi, travailler avec sa famille comporte plein d’avantages : les valeurs communes, la complicité, la confiance, la compréhension du travail, la fierté familiale… Je nous compare souvent aux cinq doigts de la main : nous avons cinq personnalités différentes et chacun de nous possède un rôle distinct et complémentaire dans l’entreprise.
« Pour nous, c’est beaucoup plus qu’une simple job : tout notre cœur est dans la business! »
La famille Pham aujourd’hui : « Aujourd’hui, mes parents sont à la retraite et s’occupent de leurs petits-enfants. Ils ont accompli leurs rêves et ça me rend très fière. »
Qu’est-ce que tu aimes le plus de ton travail?
Ce que j’aime le plus, c’est aider les membres de notre équipe à atteindre leurs objectifs, à se surpasser et à réaliser leurs rêves. Quand l’équipe atteint son plein potentiel, c’est ce qui me fait vibrer.
Pourquoi as-tu choisi de t’inscrire au programme Hautes Études en gestion hôtelière internationale (HEGHI) de l’ITHQ après avoir fait un bac en commerce à McGill?
Quand j’ai reçu mon diplôme de McGill, j’avais 22 ans et la seule expérience que j’avais me venait de l’entreprise familiale. Je travaillais alors dans les deux restaurants dont nous sommes propriétaires ( Tamashi et Kyomi) et je trouvais qu’il me manquait des outils afin de faire face aux enjeux d’une industrie où la compétition est forte.
Le programme HEGHI m’a fourni des expériences concrètes, des connaissances applicables directement et des outils aussi structurants qu’efficaces. Les stages que j’ai réalisés pendant le programme m’ont amenée à travailler dans de grandes entreprises et à voir comment les choses se font ailleurs.
« L’ITHQ m’a offert un réseau dans l’industrie hôtelière et des pairs avec qui discuter, partager et apprendre. »
L’entreprise fondée par tes parents a récemment célébré son 30e anniversaire. Comment imagines-tu l’avenir? De quoi aura l’air votre entreprise dans 30 ans?
Notre objectif est de devenir la marque de référence pour des produits vietnamiens de qualité, au Québec et à travers le monde. Nous lançons d’ailleurs cette année une toute nouvelle marque, Saigon Gourmet, une gamme de produits vietnamiens accessibles et santé, certifiés Aliments du Québec.
Que donnerais-tu comme conseils à une étudiante qui aimerait fonder sa propre entreprise dans le milieu de la restauration ou de l’alimentation?
Bien s’entourer! Ne pas avoir peur de travailler avec des experts meilleurs que soi-même. Pour ma part, je suis chanceuse : j’ai commencé avec une équipe de cinq frères et sœurs et aujourd’hui, je travaille avec une belle grande famille de 250 personnes. C’est d’ailleurs notre devise : one dream, one team!